White Canvas #1 Helen Eggenschwiler et Karyna Herrera avec leur collectif "Make Art Happening".

Lundi après-midi. Helen Eggenschwiler vient d'arriver du centre-ville de Lucerne, Karyna Herrera de l'atelier communautaire de Kriens. Nous nous rencontrons pour un café - diplomatiquement au milieu.

Karyna et Helen, en 2020, vous avez créé le collectif "Make Art Happening". Dans quel but ?

K : Nous voulions avant tout faire sortir les artistes de Kriens de leurs ateliers et les réunir.

H : Exactement. Il nous tient à cœur de rendre l'art visible.

Y compris la vôtre ?

K : Oui, cela fait partie du concept. Dans le collectif, nous sommes certes des curatrices, mais avant tout des artistes. Rien que l'idée de ne pas être exposée me fait mal. Est-ce que tu pourrais t'imaginer ne faire que du commissariat, Helen ?

H : Peut-être. Mais quand on investit beaucoup de temps, d'amour et de moyens financiers dans un projet, je pense qu'il est tout à fait justifié d'exposer aussi son propre art.

En quoi consiste votre art, Karyna ?

K : Je suis une artiste multimédia qui a plusieurs cordes à son arc. J'évolue entre autres dans le domaine de la performance. Mais à plus long terme, je suis actuellement occupée par un projet pour lequel je fabrique des objets que je photographie ensuite.

Quel type d'objets ?

K : L'accent est mis sur des objets éphémères fabriqués à partir d'aliments que je produis, que j'observe lors du processus de décomposition et que je photographie sur une longue période. Ce projet s'intitule "L'âge d'or - une dystopie" et a pour thème "L'alimentation durable".

Pourquoi durable ?

K : En tant qu'êtres humains, nous associons les aliments à certaines idées telles que la fraîcheur et le goût. Dans mes photographies, je veux rompre avec ces attentes. En général, on ne voit que des aliments en parfait état au supermarché. Ma série de photos doit contraster avec cet idéalisme, cette perfection - et représenter les aliments de manière plus "durable".

Helen, quel est le principal sujet de votre art ?

H : La photographie est mon matériau de base. Je ne me considère toutefois pas comme une photographe, mais comme une personne qui travaille avec la photographie. Je superpose différentes photos à l'aide de l'impression par transfert, je crée de nouvelles images grâce au négatif photo et à la technique d'exposition du cyanotype. J'aime aussi utiliser la photographie dans des installations de grand format.

Que voit-on sur les photographies ?

H : Je capture des moments de la vie quotidienne, puis je les transforme à l'aide des techniques mentionnées. Ainsi, de nouvelles réalités et des réalités oniriques apparaissent dans mes œuvres.

"Make Art Happening" est votre premier projet commun. L'idée est née en même temps que Corona a mis pour la première fois de nombreux artistes à genoux.

K : Oui, car à l'époque de Corona, il était et il est plus important que jamais de soutenir les artistes. Avec notre première exposition, "Winteraktion – KünstlerInnen für KünstlerInnen", en décembre 2020, nous voulions offrir aux artistes de la région une plateforme leur permettant de présenter leurs œuvres au public malgré tout, et de vendre leurs œuvres sans intermédiaire.

K : La prochaine exposition a eu lieu en 2021. 

H : C'était l'exposition d'affiches "An Ort und Stelle – Treffpunkt Kunst", où nous avons présenté de l'art au format mondial avec vingt artistes à différents endroits de Lucerne et de Kriens.

K : Et il y aura aussi une autre exposition en septembre 2022.

A quoi faut-il s'attendre ?

K : une exposition de photographie d'art au "B74 Raum für Kunst" (Lucerne, Suisse).

H : Pour lequel nous avons à nouveau fait appel à différents artistes.

Comment choisissez-vous ces artistes ?

K : La diversité est pour nous un grand besoin - surtout la diversité des sexes. Les femmes et les personnes ayant une autre identité de genre sont toujours fortement sous-représentées dans le milieu artistique.

H : Il faut vraiment changer de mentalité. L'un des nombreux problèmes est que les hommes grandissent avec une mentalité de coude, et que les femmes doivent toujours être belles, travailleuses, gentilles et aimables dès leur plus jeune âge. Des modèles féminins forts et capables de s'imposer peuvent aider.

Qui sont vos modèles forts et affirmés ?

H : Par exemple Claudia Conte ou Marina Abramo...

K : MADONNA !

H : ...vić. (rires)

K : Et Pipilotti Rist, bien sûr.

H : L'art de Pipi me semble en quelque sorte lointain...

K : Vraiment ?

H : Oui. C'est peut-être dû à la différence d'âge.

Y a-t-il souvent des désaccords entre vous ?

K : Bien sûr que oui. Nous sommes comme deux pôles. Parfois, nous nous attirons, mais parfois aussi nous nous poussons dans d'autres directions.

H (théâtral) : POURQUOI AS-TU FAIT ÇA ?!

K (également théâtral) : TU AS DÉJÀ ENVOYÉ ÇA ?! (à nouveau des rires)

H : par exemple. Mais nous nous complétons à merveille.

Vous avez pu vous mettre d'accord sur le support de la photographie d'art pour la nouvelle exposition.

H : Oui, nous sommes rapidement tombés d'accord sur ce point. Nous préférons définir un média comme point de mire plutôt que de donner aux artistes des directives sur le contenu. Nous voulons montrer la diversité du travail dans le domaine de la photographie d'art.

K : Nous avons délibérément opté pour une thématique large. Cela nous permet de laisser beaucoup de place à la créativité et à la diversité.

Make Art Happening - Exposition de photographie d'art :

«YOU DO NOT TAKE A PHOTOGRAPH. YOU MAKE IT.»

avec Oliver Kümmerli, André Schäffer, Cécile Jund. Michael Scherer, Karyna Herrera,

Helen Eggenschwiler

17 septembre - 8 octobre, B74 Raum für Kunst, Lucerne

Vernissage : 16 septembre 2022, 18 heures

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